MUSÉE D'ART DE NANTES

accueil

Simon Hantaï

Bia (Hongrie), 1922 – Paris, 2008
 

Tabula

1974
Acrylique sur toile
262 x 256 cm
Dépôt du CNAP en 2008
Inv. D.2008.1.7.P

 

Hantai Tabula.jpgLié, de 1951 à 1954, au mouvement surréaliste, Simon Hantaï s’engage ensuite dans une peinture gestuelle. C’est en 1960 qu’il adopte « le pliage comme méthode ». Huit séries de peintures explorent jusqu’en 1982 autant de manières de plier la toile. À partir de 1972-1973, simultanément à la série des « Blancs », Hantaï entreprend la série des « Tabulas ». Les deux séries procèdent d’un système de pliage, l’un aléatoire, l’autre logique, qui produit, une fois peint et déplié, le tableau.

Il faut comprendre le titre de l’œuvre au sens propre. Tabula signifie table en latin, et la toile libre, initialement non fixée sur un châssis, et imprégnée d’une couleur modulée par les plis, semble se référer à une nappe, dans sa matérialité plane, et son motif faussement répétitif, artisanal.

Elle signifie également tout ce que l’on pouvait inscrire sur les tablettes à l’époque romaine : le langage, la loi, les comptes. Comme le dit Gilles Deleuze, la grille des Tabulas n’est « ni exacte, ni inexacte mais anexacte et pourtant rigoureuse, inexacte par essence et non par hasard ». L’œuvre contient en elle une tension entre la règle et le hasard, l’abstraction géométrique produite par la grille et la sensualité gestuelle produite par le pliage. Le titre fait en outre référence à l’expression « tabula rasa », la table rase, souvent utilisée pour désigner les avant-gardes picturales, qui prétendent repartir à zéro, oublier les traditions picturales. Dans ce sens, la série des « Tabulas » ne promettrait pas la fin d’un processus, mais une sorte d’espoir de nouveaux commencements.

Cependant, entre 1976 et 1979, Hantaï s’arrête de peindre pour étudier, à la suite de Buffon, Goethe, Cézanne, Matisse et même Jackson Pollock et Barnett Newman, les effets réels de la couleur. Aussi est-il nécessaire de lire dans le titre une autre tension que son œuvre tente de résoudre entre le tableau blanc, celui de l’impossibilité de peindre et la table pleine, celle d’un long et pesant héritage pictural qu’il faut bien prendre en charge.

Sophie Lévy
Extrait du Guide des collections du Musée d'arts de Nantes

 

Crédit photographique : © Musée d'arts de Nantes - C. Clos
Archives Simon Hantaï © Adagp, Paris

< Quelques incontournablesHaut de page